Frontalier

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2022 Luxembourg - TNL
Spectacle
Avec : Jacques Bonnaffé
Texte : Jean Portante
Dates :
Aucune date prévue pour le moment.
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_DSF2503 lecture de FRONTALIER ici.
https://vimeo.com/783948555.
mot de passe = frontalier.

Par une série de chants successifs, Frontalier se fait poème des traversées imaginé au volant d’une automobile jouant à saute-frontière chaque matin entre France et Luxembourg. Son conducteur, Jean Portante, y murmure ses migrations d’enfance, celles de sa famille italienne venue travailler dans les mines et l'acier à Differdange (Luxembourg). Ainsi Frontalier serait l’épopée de toutes les frontières enjambées depuis Enée, fuyant sa ville de Troie, jusqu’au migrant d’aujourd’hui. Processions des voyageurs contraints par l’exode ou le salaire quotidien à changer de pays. C’est de plein fouet, une façon chorale, intime et pertinente de parler des migrations.

Jean Portante est - son nom l’indique - un poète de poids, un Portante, de famille Italienne habitant du Luxembourg, poète, éditeur (éditions Phi) et voyageur.

En voilà un qui est poète et ce n’est pas parce qu’il parle poétiquement, (encore qu’il faut le suivre, dans son jeu d’énigmes et de sons) il est poète d’avoir caché un autre monde dans celui qu’il nous tend à voir. Poète du dessous sensible, et de la trame enfouie, poète de l’existence il est bien possible qu’en éclairant cette veine obscure c’est à chacun qu’il donne jour. Cette famille est la notre, celle des migrations lasses, issue des campagnes, des conquêtes et des guerres. Italie, cette perception donnée par les soleils, le mûrissement, ces couleurs pleines, ce parfum sucré, cette sensation aux êtres, cette affection sans frein jusqu’à des nostalgies composées, pour la sainte famille. Deviendra ma famille moi qui n’ai connu que des ciels grisés d’eau, qui n’ai jamais empaqueté ma vie ni porté d’autres frontières que celles de l’intérieur. Ma petite région mentale natale sommeille et fait une couleur trouble à ceux-là grandis sous une latitude 50 ou 49, selon qu’on se trouve à Roubaix ou Luxembourg et issus par croyance, de la Méditerranée.

Quelques thèmes du texte-poème.

  • L’immigration familiale, liée à l’industrie extractive (charbon acier) : l’auteur est d'une famille italienne, venue à Luxembourg avant-guerre.
  • La migration journalière des travailleurs Frontaliers, l'interminable serpent des voitures le long des usines mortes.
  • les migrations immuables, les processions de fugitifs. La mer telle un mur, les noyades et les vies anéanties.
  • La fuite des héros mythologiques, il faut un début à tout, celle d’Ulysse mais surtout celle d’Énée, le vaincu de Troie.
  • La nostalgie de l’Italie….

Ces thèmes et ces histoires se mêlent formant une ode à l'intégration, une prière, une imploration. Je travaille souvent sur la poésie, mais je procède du théâtre et de la connaissance du jeu et de la diction. Je crois que j’ai peur de l’excès de gravité qui entoure les poèmes, je trouve essentiel de transmettre. Au moins rendre les textes attirants et sonores. J’oserai dire entrainants.


Jacques BONNAFFÉ comédien et lecteur :
Nous, les acteurs, nous aimons bien prendre le volant, c’est un jeu d’enfant et nous mimons la vitesse à la fenêtre. La fureur de vivre semble loin à l’heure du risque zéro, observant la lenteur immobile du grand serpent des autos j’aime retrouver les mots de Jean Portante, l’affection qu’il porte aux migrations familiales de son enfance Italo-Luxembourgeoise Frontalier est une méditation automobile qui trouve son roulement par la parole. Frontalier tresse une histoire personnelle traversant plusieurs fois la frontière comme le font les frontaliers de France à Luxembourg, comme l’ont fait ses parents venus d’Italie ou ses grands-parents les Portante. Par un jeu de mot facile le Portante en impose, un sacré bagage, romancier poète, éditeur-relieur de pays, pèlerin impénitent, l’homme des liens, traducteur transmetteur, il est des deux bords sans contradiction, poète et chroniqueur.
C’est un très beau texte Frontaliers, mon métier est de le savoir et j’en sais quelque chose… très incroyables ces méandres intimes qui se mélangent aux méandres du serpent automobile transfrontalier, ces travailleurs dans l’embouteillage prolongeant le corps migrant qui depuis Enée, frappe à rythme quotidien l’aller et le retour, le retour et l’aller, la partition chantée du chœur des anonymes, fredonnée ce matin là sur une route de Moselle ou du Luxembourg. Cet aria des souvenirs de Jean, croisant plusieurs voix en sa chanson de lui-même transporté, une famille un peuple, un passé donc une histoire et devant nous, l’embouteillage. La vie stoppée, l’absurdité de l’économie mise à plat dans une préfiguration de grand désert. On entend le vent qui assèche, la mort fossilisant nos paysages industriels puis nos routes et bientôt nos banques, nos commerces, nos édifices…et la course du passé là sous nos yeux détalant et ce geste irrépressible, tic-tac, vérifier l’heure au poignet ou sur le tableau de bord, s’assurer qu’on est assez en avance pour être encore à l’heure. Tant pis si tout est bloqué, faire rouler les automobiles c’est pour en vendre encore et déplacer ces transhumants résignés, les nourrir les habiller, les salarier et qu’ils aient un peu d’argent à dépenser, alors que d’autres perdent leur vie face aux murs des frontières…